Hervé Rousseau
Il y a cinq ans, la privatisation de FDJ a relancé l’actionnariat individuel. Les petits porteurs sont 4 millions.
Il y a tout juste cinq ans. Le 21 novembre 2019, la privatisation de FDJ (Française des Jeux) faisait un tabac auprès des particuliers.
L’opération attirait plus 500 000 petits porteurs, dont une grande majorité de néophytes des marchés boursiers. Après des années de désamour, cette introduction en Bourse a largement participé à réconcilier les Français avec l’investissement en actions.
Auparavant, échaudés par les crises à répétition, les Français s’étaient massivement détournés des placements en actions. Auparavant, le nombre d’actionnaires individuels présents à la Bourse de Paris avait ainsi été divisé par plus de deux en une dizaine d’années pour tomber à environ 3 millions, selon la Banque de France.
Le succès de la mise en Bourse de FDJ et le beau parcours du titre durant la première année de cotation (le titre a pratiquement doublé de valeur) ont ensuite encouragé les vocations. Le retour des particuliers s’est encore amplifié avec la crise sanitaire. Une nouvelle génération d’investisseurs a alors fait son apparition, essentiellement des trentenaires, novices en Bourse. Ils ont découvert l’investissement en actions pendant les confinements, lorsqu’ils étaient coincés chez eux avec pour principale fenêtre sur le monde leurs ordinateurs.
«L’introduction en Bourse de Française des jeux, puis la pandémie de Covid-19 ont marqué un tournant très positif. Car la présence d’actionnaires particuliers, qui investissent sur le long terme, est essentielle au bon fonctionnement du marché», se félicite Stéphane Boujnah, président du directoire et directeur général d’Euronext. Et, contrairement aux idées reçues selon lesquelles les particuliers ont tendance à venir en Bourse lorsque le marché est au zénith, cette fois, nombreux sont ceux qui ont acheté au moment où les cours étaient au plancher, lors du premier confinement.
En 2020, plus de 400 000 Français ont ainsi fait leurs premiers pas en Bourse. Au total, en deux ans, en 2019 et en 2020, les rangs des investisseurs individuels actifs à la Bourse de Paris se sont étoffés de près de 800 000 personnes, selon l’AMF (Autorité des marchés financiers). Les années suivantes, l’euphorie s’est estompée. Les particuliers ont continué de se convertir à la Bourse, mais à un rythme moins soutenu.
Le nombre de nouveaux investisseurs actifs à la Bourse de Paris est tombé à 214 000 en 2021, puis à 195 000 en 2022 et à 181 000 l’an dernier, selon l’AMF. Néanmoins, depuis l’introduction en Bourse de FDJ, «la place de Paris compte plus de 1 million de nouveaux investisseurs particuliers», explique-t-on chez Euronext. Ils sont désormais un peu plus de 4 millions en France.
«Je me félicite de voir notamment la part des 18-34 ans augmenter significativement dans ’investissement en Bourse », souligne Stéphane Boujnah.
De fait, «une nouvelle génération d’investisseurs a fait son apparition à la Bourse de Paris, explique Marc Lefèvre, président de Place des investisseurs (anciennement Fédération des investisseurs individuels et des clubs d’investissement, F2iC). Ils sont plus jeunes, plus mobiles, les femmes sont majoritaires (54% des nouveaux investisseurs étant des femmes). Et ils sont particulièrement sensibles aux questions environnementales, sociales et de gouvernance. Ils ont un rapport décomplexé à la Bourse et veulent rentabiliser leur investissement rapidement.»
Reste qu’ailleurs en Europe, les boursicoteurs sont souvent plus présents. Aux Pays-Bas, « il existe une grande culture financière, et les particuliers sont plus nombreux à investir sur les marchés financiers», constate Stéphane Boujnah, dont le groupe chapeaute notamment les Bourses de Paris et d’Amsterdam. Les réflexes ont la vie dure et beaucoup de Français conservent une certaine prudence vis-à-vis de l’investissement en actions. Les raisons de cette tiédeur sont multiples. «La première réside dans l’attachement des Français à la pierre : l’immobilier pèse pour les deux tiers dans leur patrimoine», expliquent les spécialistes de Pictet. Autre facteur : «leur aversion au risque», ajoute la banque suisse. Les
Français ont un goût prononcé pour les livrets d’épargne réglementés : livrets A, livret de développement durable et solidaire (LDDS) ou livrets d’épargne populaire.
«Il s’agit de produits simples à appréhender et dont le rendement est garanti et sans fiscalité. Des arguments qui font mouche», constate Pictet….